Spectres de raies

par clea last modified 2010 Oct 20 16:16

 

Nous traîterons ici les points suivants :

1 - Formation du spectre de raies - spectre de l'atome d'hydrogène
2 - Excitation et ionisation par les collisions
3 - Le spectre de raies renseigne sur la composition chimique et la température
4 - Un atome peut aussi émettre ou absorber un spectre continu
5 - Spectres des atomes complexes et des ions

 

 

 

FORMATION DU SPECTRE DE RAIES -SPECTRE DE RAIES DE L'ATOME D'HYDROGENE

L'atome d'hydrogène est l'atome le plus simple et c'est lui qui possède le spectre le plus simple. Nous nous contenterons donc de décrire le spectre de cet élément, qui est par ailleurs le plus répandu dans l'univers.

 

Les premières raies spectrales de l'hydrogène que l'on ait étudiées sont situées dans le domaine visible du spectre, bien qu'elles aillent en se resserrant vers une limite située dans le proche ultraviolet. Cette série de raies s'appelle la "série de Balmer", du nom du physicien suisse ayant découvert la loi qui régit l'espacement en longueurs d'onde des raies. Les premières raies sont numérotées au moyen de l'alphabet grec. La première raie, Ha a la longueur d'onde 656,2 nm elle est donc rouge ; la seconde, Hb, est bleue à 486,1 nm, la troisième, Hg est violette à 434,0 nm, et ainsi de suite. Les dernières sont très rapprochées ; il n'y a plus de raies pour des longueurs d'onde plus courtes que 364,6 nm. Cette longueur d'onde limite est la "limite de la série de Balmer".

L'atome d'hydrogène peut absorber ou émettre des quantités d'énergie bien particulières : celles qui correspondent au passage de l'atome d'un niveau d'énergie à un autre. Le passage d'un niveau caractérisé par une énergie En à un niveau plus bas, caractérisé par une énergie Ep inférieure à En se fait avec émission de la différence d'énergie En - Ep .

En utilisant la description quantique de la lumière, on voit que l'atome peut émettre un photon dont l'énergie est égale à la différence d'énergie entre les deux niveaux. Cette énergie correspond, par la formule de Planck (énergie = h n), à une onde électromagnétique de fréquence n (ou de longueur d'onde l = c/n) bien définie. Le saut d'énergie se manifeste donc par une raie d'émission dans le spectre de l'atome.

L'atome d'hydrogène peut aussi absorber de l'énergie, ceci lui permettant de passer d'un niveau inférieur à un niveau supérieur, par exemple en absorbant un photon. Mais ceci n'est possible que si le photon possède exactement l'énergie nécessaire, c'est-à-dire la différence d'énergie entre le niveau d'arrivée et le niveau de départ. Cela veut donc dire que si l'on envoie sur de l'hydrogène une collection de photons de diverses longueurs d'onde (c'est-à-dire une lumière blanche), seuls les photons qui ont juste l'énergie nécessaire pour effectuer une des transitions possibles peuvent être absorbés. On observera donc un spectre continu, correspondant aux photons qui sont passés librement sans interagir, parsemé de raies d'absorption, correspondant aux photons sélectivement absorbés, qui ont donc disparu du faisceau de lumière pour certaines longueurs d'onde discrètes caractéristiques de l'atome.

Puisque les longueurs d'onde des photons émis et des photons absorbés sont calculées de la même façon à partir des différences d'énergie entre les mêmes niveaux, on comprend pourquoi les raies d'émission et les raies d'absorption se produisent aux mêmes longueurs d'onde.

Lorsque le niveau inférieur est le plus bas (niveau fondamental), la série de raies porte le nom de série de Lyman. Cette série de raies est située dans l'ultraviolet. Au contraire, la série de raies correspondant à un niveau inférieur de rang n = 3 est située dans l'infrarouge : on l'appelle série de Paschen. La série de Balmer est celle qui correspond au niveau inférieur n = 2 .

 

On note que l'énergie nécessaire pour ioniser l'atome d'hydrogène à partir de son niveau fondamental est 13,6 eV. Tout photon de longueur d'onde inférieure à 91,15 nm (qui est la limite de la série de Lyman) est susceptible d'ioniser l'atome d'hydrogène dans son état fondamental ; l'énergie supplémentaire (différence entre l'énergie du photon et l'énergie d'ionisation) est communiquée à l'électron libre sous forme d'énergie cinétique.

De même, si l'atome est initialement dans son premier état excité (n = 2), la longueur d'onde limite provoquant l'ionisation est égale 364,6 nm : c'est la limite de la série de Balmer. Tout photon de longueur d'onde inférieure à cette valeur peut provoquer l'ionisation de l'atome.

EXCITATION ET IONISATION PAR LES COLLISIONS

La lumière peut exciter un atome, en portant cet atome sur un niveau élevé ; elle peut aussi l'ioniser en lui apportant l'énergie suffisante pour que l'électron échappe à l'attraction du noyau. La théorie précédente l'explique.

Des collisions entre les atomes et d'autres particules, telles que des électrons ou d'autres atomes, peuvent avoir le même effet : l'énergie fournie à l'atome pour l'exciter ou l'ioniser est prélevée sur l'énergie cinétique de la particule qui entre en collision. L'effet de ces collisions est lié à la température. A basse température, les collisions avec des particules de faibles vitesses ne fournissent pas suffisamment d'énergie pour exciter l'atome qui reste ainsi dans son niveau d'énergie fondamental. A mesure que la température augmente, le nombre d'atomes excités, c'est-à-dire dans des états d'énergie n = 2, n = 3, etc., augmente. Ainsi, au-delà de 10 000 K, l'ionisation des atomes d'hydrogène par collision devient importante.

L'état stable d'un atome est son niveau d'énergie fondamental. Lorsqu'un atome est porté dans un niveau excité, il n'y reste pas longtemps. Il revient spontanément à son niveau fondamental en émettant un photon dont la longueur d'onde correspond à la variation d'énergie relative à cette transition.

On peut se demander pourquoi, dans le cas où l'atome est excité par absorption d'un photon et où il se désexcite en émettant un photon identique à celui qui a été absorbé, le bilan global pour l'observateur se solde par une raie d'absorption, alors qu'il semble qu'il devrait être nul. Ceci tient au fait que le photon absorbé provient d'une direction donnée, qui est celle du faisceau lumineux envoyé sur le milieu gazeux, alors que la réémission se fait au hasard dans n'importe quelle direction. Il y a bien de temps en temps un photon qui est réémis dans la direction du faisceau, mais la plupart des photons sont réémis dans des directions différentes. Ainsi l'observateur qui regarde dans la direction du faisceau lumineux incident voit un spectre continu, parsemé de raies d'absorption ; celles-ci correspondent aux photons absorbés par le gaz, parce qu'ils ont l'énergie correspondant à une transition de l'atome qui constitue ce gaz, et réémis le plus souvent dans des directions autres que celle du faisceau incident, c'est-à-dire qu'ils sont perdus pour lui.

Un observateur, qui serait situé dans une direction autre que celle du faisceau incident, verrait ceux des photons réémis qui se trouvent dans sa direction. Il verrait donc des raies d'émission. Mais ces raies sont beaucoup moins intenses que les raies d'absorption observées dans la direction du faisceau incident, puisque la réémission étant isotrope, seule une faible partie de la lumière absorbée est réémise dans une direction donnée.

 

LE SPECTRE DE RAIES RENSEIGNE SUR LA COMPOSITION CHIMIQUE ET LA TEMPÉRATURE DU MILIEU OU SE SONT FORMÉES CES RAIES

La première condition pour qu'une raie spectrale, caractéristique d'un élément chimique, puisse se former est évidemment que cet élément chimique soit présent : si on observe les raies de la série de Balmer de l'hydrogène dans le spectre d'une étoile, cela signifie qu'il y a certainement de l'hydrogène dans cette étoile. Le spectre de raies d'une étoile, ou de tout autre astre, nous renseigne donc sur les divers éléments chimiques présents dans cet astre.

Cependant la réciproque n'est pas vraie : si on n'observe pas les raies d'absorption de la série de Balmer de l'hydrogène dans une étoile, cela ne veut pas dire nécessairement qu'il n'y ait pas d'hydrogène dans les couches superficielles de cette étoile. En effet, la formation d'une raie spectrale en absorption correspond au passage d'un atome d'un niveau d'énergie excité de départ à un niveau d'énergie d'arrivée de plus grande énergie. Encore faut-il, pour que la raie puisse se produire, qu'il y ait effectivement des atomes ayant le niveau d'énergie de départ.

Considérons l'exemple de trois étoiles dont les couches superficielles ont des températures respectivement de 3 000 K, 8 000 K et 20 000 K.

Dans l'étoile la plus froide, l'énergie d'agitation thermique n'est pas assez grande pour porter les atomes d'hydrogène dans le premier niveau excité (ni a fortiori dans les niveaux supérieurs) : tous les atomes d'hydrogène sont donc dans leur niveau fondamental. Considérons maintenant la lumière formée dans les couches plus profondes, donc plus chaudes, de l'étoile qui donne un spectre continu. Les photons de longueurs d'onde 656,2 nm, 486,1 nm, 434,0 nm etc., qui correspondent aux raies successives de la série de Balmer Ha, Hb, Hg etc., sont présents dans cette lumière, mais il ne sont pas absorbés par l'hydrogène des couches superficielles parce qu'ils ont l'énergie correspondant à la transition entre le niveau n = 2 et un niveau supérieur, et qu'il n'existe pas d'atome d'hydrogène dans ce niveau d'énergie n = 2.

Pour une température plus élevée, l'énergie d'agitation thermique devient suffisante pour qu'un certain nombre d'atomes soient excités dans le niveau n = 2 et absorbent les photons correspondant à une raie de Balmer. C'est le cas pour une étoile de température superficielle de l'ordre de 8 000 K, dans laquelle on observe effectivement les raies de la série de Balmer en absorption.

Si la température est encore plus élevée, l'énergie d'agitation thermique devient capable d'ioniser l'hydrogène. Pour une température de 20 000 K, l'hydrogène est en très grande proportion ionisé : il ne reste plus beaucoup d'atomes d'hydrogène, ces atomes étant par ailleurs répartis dans les divers niveaux excités supérieurs, et les raies de Balmer ne peuvent donc se former.

A mesure que la température croît, la proportion d'atomes excités au niveau n = 2 par rapport au nombre total d'atomes et d'ions commence d'abord par augmenter pour ensuite diminuer. L'intensité des raies de la série de Balmer de l'hydrogène passe par un maximum pour une température voisine de 10 000 K. Cette intensité est donc un indicateur de la température qui règne dans le milieu où ces raies se sont formées. En observant le spectre de la première étoile dans une gamme plus large, incluant le domaine ultraviolet, on aurait pu voir les raies de la série de Lyman en absorption, puisqu'elles correspondent à une transition à partir du niveau fondamental.

En définitive, une raie donnée est d'autant plus intense que :

- l'élément chimique qu'elle caractérise est plus abondant ;

- la proportion d'atomes occupant l'état d'énergie qui correspond au niveau de départ de la transition produisant cette raie est plus élevé.

Dans la pratique, il est possible de séparer les deux effets. Si l'on considère plusieurs raies d'un même élément chimique formées à partir de niveaux d'énergie différents, on peut, en comparant les intensités de ces raies, déterminer la température du milieu où elles se forment. Pour une température donnée, une raie donnée est d'autant plus intense que l'élément qui la produit est plus abondant. L'étude des raies d'absorption dans le spectre d'une étoile permet donc de déterminer la température de la région où se produisent ces raies et l'abondance des divers éléments chimiques dans l'étoile.

 

UN ATOME PEUT AUSSI ÉMETTRE OU ABSORBER UN SPECTRE CONTINU

Les interactions entre les atomes ou les ions et les électrons libres rendent possible une suite continue de variation d'énergie. En effet, un atome est capable d'absorber n'importe quel photon d'énergie supérieure à l'énergie nécessaire à son ionisation. Dans ce cas, une partie de l'énergie du photon absorbé permet l'ionisation de l'atome, le complément d'énergie est transféré à l'électron libre sous forme d'énergie cinétique.

Un atome d'hydrogène dans le premier état d'énergie excité (n = 2) peut être ionisé par un photon de longueur d'onde inférieure ou égale à 364,6 nm, qui est la limite de la série de Balmer. Cet atome est donc capable d'absorber tous les photons de longueur d'onde plus courte que 364,6 nm. Si l'atome d'hydrogène est dans son niveau fondamental, la limite de la série de Lyman est obtenue pour la longueur d'onde de 91,2 nm. Cet atome est donc capable d'absorber tous les photons de longueur d'onde plus courte que 91,2 nm. Ceci explique la variation brutale de l'intensité du spectre continu d'une étoile au voisinage de ces longueurs d'onde : pour les longueurs d'onde plus courtes que 364,6 nm le spectre continu est moins intense.

Inversement, un atome ionisé peut recapter un électron libre. La différence entre l'énergie du noyau de l'atome, augmentée de l'énergie cinétique de l'électron libre et celle de l'atome formé, peut être émise sous la forme d'un photon. La longueur d'onde de la lumière émise ainsi varie de façon continue .

 

SPECTRES DES ATOMES COMPLEXES ET DES IONS

Si l'atome, ou l'ion, possède plus d'un électron, sa structure est beaucoup plus complexe. Les électrons ont tendance à se répartir en couches, chacune étant située à une certaine distance moyenne du noyau (en fait, chaque couche est subdivisée en sous-couches pour lesquelles cette distance moyenne est différente). Cette structure en couches est en particulier responsable des propriétés chimiques de l'élément.

Un atome complexe possède, comme l'atome d'hydrogène, un certain nombre d'états d'énergie possibles qui correspondent aux différentes répartitions des électrons autour du noyau, et de la lumière peut être émise ou absorbée quand il y a transition d'un électron d'un état d'énergie à un autre. Le spectre d'un atome est entièrement différent de ceux des ions auxquels cet atome peut donner naissance ; de même, les spectres des différents ions d'un même atome diffèrent entre eux : les caractéristiques du spectre d'un élément dépendent essentiellement du nombre d'électrons. Ainsi l'hélium neutre (que les spectroscopistes notent He I) et l'hélium ionisé une fois (He II) ont des spectres totalement différents. Par contre, le spectre de l'hélium ionisé une fois (qui possède un seul électron périphérique) présente des séries de raies analogues à celles de l'atome d'hydrogène.

 


Spectre d'émission de la couronne solaire (début et fin d'une éclipse totale)
La raie verte, un temps attribuée au "coronium", est due au Fer 13 fois ionisé.

 

 

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